Recrutement des enseignants-chercheurs : répondre à l’urgence mais pas n’importe comment !

Comment assurer la continuité des recrutements afin de garantir que les postes ouverts seront bien pourvus à la rentrée de septembre ? C’est à cette problématique que prétend répondre un décret généralisant le recours à la visioconférence. Le Sgen-CFDT exige le maximum de garanties !

Dans la période de confinement qui s’impose pour faire face à la crise sanitaire, et compte tenu d’un calendrier relativement contraint, le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) avait prévu de soumettre au Comité technique ministériel (CTMESRI) du 24 mars un décret autorisant – entre autres – que les recrutements des chercheurs et des enseignants-chercheurs puissent se tenir en totalité par visioconférences.

Le Sgen-CFDT a obtenu le report du CTMESRI pour chercher la solution la plus adaptée aux circonstances

Tout en tenant compte de ces circonstances exceptionnelles, le Sgen-CFDT, après avoir pris connaissance du contenu du texte, a écrit au Directeur général des Ressources humaines (DGRH) pour demander le report du CTMESRI afin d’avoir plus d’informations et de chercher la solution la plus adaptée possible à ces circonstances. La réponse a été rapide et favorable et le CTMESRI reporté à une date ultérieure.

Ce que prévoyait le projet de décret initial

Ce projet de décret visait à ouvrir à l’ensemble des membres des jurys des concours de chercheurs et des comités de sélection et autres jurys de recrutement d’enseignants-chercheurs organisés au titre de l’année 2020, la possibilité d’utiliser la visioconférence pour les études des dossiers, les auditions ainsi que pour les réunions de délibération. Cela concernait, en résumé :

  • les jurys des concours d’accès aux corps de chargés de recherche (CR) et de directeurs de recherche (DR) ;
  • les jurys des concours d’accès aux corps assimilés aux enseignants-chercheurs (EC) ;
  • les comités de sélection des concours de recrutement de professeur des universités (PU) ou de maître de conférences (MCF) ;
  • les jurys des concours réservés aux MCF et EC assimilés ayant achevé depuis moins de cinq ans un mandat en qualité de président ou de vice-président d’un établissement.

Concernant les personnels ITRF, le projet de décret ouvrait aussi la possibilité d’avoir recours à la visioconférence pour les commissions administratives paritaires, les commissions consultatives paritaires et les commissions paritaires d’établissement pour l’année 2020.

Pourquoi le Sgen-CFDT a demandé le report du CTMESR ?

Si le Sgen-CFDT partage la préoccupation d’organiser la continuité des recrutements afin de pourvoir les postes, il estime que la mise en œuvre de dispositions nouvelles doit offrir un maximum de garanties pour assurer le bon déroulement des auditions et entretiens.

La mise en œuvre de dispositions nouvelles doit offrir un maximum de garanties pour assurer le bon déroulement des auditions et entretiens.

Le Sgen-CFDT a formulé quatre requêtes préalables à l’étude du projet de décret :

  1. il convient de dissocier clairement les concours pour chaque catégorie de personnels concernés (chercheurs, enseignants-chercheurs) car les contraintes en termes de taille, de nombre de dossiers, et de calendrier ne sont pas les mêmes. Sur ce dernier point, si les recrutements d’enseignants-chercheurs peuvent difficilement être décalés de plus de deux ou trois semaines, il semble qu’il y ait davantage de marge possible concernant les CR/DR.
  2. il est impératif d’examiner simultanément le projet de décret fixant les conditions de recours à la visioconférence et l’arrêté qui précisera les modalités pratiques de ce recours. De fait, le Sgen-CFDT attend de connaitre tous les cadrages techniques qui seront posés (en particulier concernant les dispositifs prévus pour permettre le secret du vote) pour exprimer une position éclairée. L’examen par le CTMESRI du décret et de l’arrêté doivent se faire en même temps.
  3. si ces dispositions devaient également concerner les promotions à la liste d’aptitude des ITRF, la dématérialisation des dossiers doit constituer un préalable pour faciliter leur examen par les élus dans les meilleures conditions ;
  4. le Sgen-CFDT souhaite circonscrire les dispositions envisagées aux seules campagnes de recrutement qui se dérouleront sur la période du confinement et non jusqu’à la fin de l’année 2020.

C’est donc pour satisfaire à l’ensemble de ces requêtes, que le Sgen-CFDT a expressément demandé au DGRH de repousser la tenue du CTMESRI et d’envisager, en outre, de convoquer un Comité technique des personnels de statut universitaire (CTU) afin d’examiner spécifiquement les textes concernant les enseignants-chercheurs.

Il convient de convoquer un CTU pour les questions relatives aux enseignants-chercheurs

Les premières réponses de la DGRH

Le jour même de notre envoi (vendredi 20 mars), le DGRH a donné une suite favorable en annulant le CTMESRI du 24 et en prenant l’initiative d’inviter les organisations représentatives à une réunion de concertation qui s’est tenue en visioconférence lundi 23 mars après-midi. Concernant le texte qui devait être examiné, le DGRH attire notre attention sur le fait qu’il s’agit d’un décret en Conseil d’Etat dont l’activité est également profondément perturbée en cette période. Il nous confirme, par ailleurs, que s’agissant des enseignants-chercheurs, le CTU sera bien consulté puisqu’il dispose d’une compétence exclusive sur le décret de 1984.

Lors de la réunion, plusieurs informations nous ont été confirmées :

  • report d’échéances concernant le dépôt des dossiers et desserrement du calendrier : la date limite de dépôt des dossiers est désormais fixée au 9 avril (au lieu du 26 mars) et l’ensemble du calendrier de la campagne synchronisée de recrutement a été révisé (voir ici ou sur le portail Galaxie du MESRI) ;
  • des réunions bilatérales seront proposées rapidement aux organisations syndicales avant le CTMESRI pour discuter des textes qui seront proposés ;
  • l’arrêté commun qui est lié au décret fixant les modalités techniques de visioconférences sera transmis et examiné en même temps ;
  • afin de parer à toutes les éventualités (problème de tenue des comités de sélection ou autres difficultés pratiques), il est d’ores et déjà prévu qu’à la fin de la session synchronisée, tout ce qui n’aura pas pu être traité bascule automatiquement au fil de l’eau (mais cela pose encore quelques soucis techniques) ;
  • les promotions seront à dissocier du recrutement, ce dernier étant plus prioritaire. Les promotions devraient probablement être traitées dans un second temps en dissociant ITRF, EC et chercheurs.

L’ensemble du calendrier de la campagne synchronisée de recrutement a été révisé

Les principaux points de vigilance du Sgen-CFDT

Le Sgen-CFDT est bien évidemment soucieux que les postes publiés soient pourvus afin que les jeunes docteurs puissent avoir un emploi dès septembre et que les équipes pédagogiques soient complètes à la rentrée. Il est donc important d’organiser la continuité des recrutements dans la période actuelle de confinement liée à la crise sanitaire. Le Sgen-CFDT se félicite du report des échéances de la campagne synchronisée et espère maintenant que cela sera suffisant.

Toutefois, s’agissant du recours élargi à la visioconférence, il doit être soumis à un certain nombre de conditions, notamment techniques, à commencer par une plateforme solide et sécurisée (si possible ministérielle) qui permette d’assurer le secret des votes.

De plus, le Sgen-CFDT souhaite que la phase 1 (admissibilité, sélection sur dossiers) et la phase 2 (auditions) du recrutement soient les plus dissociées et le plus espacées possibles de façon à limiter le recours à la visioconférence pour les auditions.

Pour la phase 1 (admissibilité, sélection sur dossiers) :

Il peut être envisagé de recourir à la visioconférence pour l’ensemble des membres du comité à condition que le ministère diffuse un mini-guide des bonnes pratiques, par exemple :

  • scinder les réunions en séances de 3h maximum, avec au minimum 1h30 d’interruption entre chaque séance (pour faciliter l’organisation des membres confinés avec leur famille) ;
  • s’assurer à l’avance que chaque membre pourra bien être disponible durant l’ensemble de la séance (rappeler que tout membre qui quitte la séance même 10 mn ne peut plus participer au vote : prévoir donc la possibilité d’interruption générale de séance en cas de problème de ce type).

D’une manière générale, il serait préférable que les comités ne se réunissent pas avant le mois de mai (ce qui est possible avec le report du calendrier), pour permettre aux membres des comités d’utiliser les salles équipées de leur établissement et non pas leur équipement personnel depuis chez eux (donc dans de bien meilleures conditions à la fois techniques et humaines). Il est permis d’espérer que dans la seconde quinzaine de mai une sortie de confinement au moins partielle aura eu lieu, même si tout le monde ne pourra pas forcément se déplacer aisément.

Pour la phase 2 (auditions des candidats) :

Le Sgen-CFDT souhaite que les membres des comités se réunissent, autant que possible, de façon physique, afin de faciliter les échanges, toujours très complexes. D’où l’importance de décaler cette phase à juin. Le Sgen-CFDT n’est, en revanche, pas opposé à ce que les candidats recourent à la visioconférence, parce qu’il est possible qu’à cette date certains soient toujours en quarantaine ou que les déplacements entre régions soient encore compliqués. Et que c’est aussi un facteur d’équité entre candidats du fait du coût des déplacements, tant en argent qu’en temps (or, après la sortie du confinement, les agendas de chacun risquent d’être surchargés, pour rattraper le temps perdu).