Parcoursup : mettre fin à un système à deux vitesses – Tribune

Parcoursup ne fait que mettre en lumière une injustice dénoncée depuis longtemps par La Fage et le Sgen-CFDT... Tribune initialement publiée sur le site du quotidien Le Monde

Ce n’est pas Parcoursup qui empêche un étudiant d’être inscrit dans les filières sélectives, c’était déjà le cas avant !

Pour la Fage et le Sgen-CFDT, l’existence d’une plateforme recensant les voeux ne change rien au principe de tri des dossiers qu’opèrent les filières sélectives. Le vrai problème est celui de la place de ces filières dans le système d’enseignement supérieur, et donc de l’adéquation public/formation et de son corollaire : le financement de ces formations. Toutes les formations post-bac ont connu une très forte croissance de leurs effectifs ces dernières années, sans que les moyens ne soient augmentés à proportion.

Il faut développer l’accompagnement au lycée dès la seconde et développer les partenariats entre lycées et établissements d’enseignement supérieur, pour que TOUS puissent préparer efficacement et sereinement cette étape essentielle du passage du secondaire au supérieur. Il faut également travailler à créer des passerelles entre les formations et développer massivement la formation tout au long de la vie afin de ne pas rester enfermé dans sa formation initiale…

TRIBUNE PARCOURSUP

Parcoursup : mettre fin à un système à deux vitesses - Tribune - La Fage - Sgen-CFDT

Parcoursup : « Le vrai problème est celui de la place des filières sélectives dans l’enseignement supérieur »

LE MONDE 19.06.2018
Par Jimmy Losfeld (Président de la Fédération des associations générales étudiantes (FAGE)) et Franck Loureiro (Secrétaire général adjoint du SGEN-CFDT)

Le SGEN-CFDT et la FAGE considèrent que la nouvelle plate-forme d’orientation ne fait que rendre visibles des problèmes existants. Ils préconisent dans une tribune au « Monde » la multiplication de passerelles entre les différentes filières.

Tribune. Mettre fin à un système à deux vitesses : depuis le 22 mai, la nouvelle plate-forme Parcoursup est entrée en activité. Avec le changement d’algorithme, la temporalité de l’affectation se voit profondément modifiée.

Alors qu’il est difficile d’établir un jugement aussi précoce sur ce nouveau système, certains n’ont pu s’empêcher de se faire les sirènes alarmistes et anxiogènes au détriment des bacheliers 2018. La critique insiste sur une sélection qui aurait vu le jour avec cette nouvelle plate-forme.

Mais cette sélection existait bien avant ! L’obscurité d’APB (Admission post-bac) permettait d’occulter la véritable injustice qui existe dans notre enseignement supérieur : l’existence de filières sélectives favorisant l’entre-soi social. Parcoursup permet de la rendre visible aux yeux de tous ! Il sera donc plus facile de la combattre. Car tous les jeunes et tous les personnels ont droit à la même considération.

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En effet, depuis des décennies, bien avant les plates-formes APB ou Parcoursup, s’est développé un enseignement supérieur à deux vitesses, avec des filières sélectives (CPGE, IEP, DUT, BTS, formations paramédicales…) et des filières non sélectives (licences). Sans que les mêmes qui critiquent aujourd’hui Parcoursup ne se posent la question de la violence de ce système sur les jeunes et les personnels.

Exclusion camouflée

Ce n’est pas Parcoursup qui empêche un étudiant d’être inscrit dans ces filières sélectives, c’était déjà le cas avant ! Le vrai problème est celui de la place des filières sélectives dans le système d’enseignement supérieur, et donc de l’adéquation public-formation et de son corollaire : le financement de ces formations. Qu’il y ait ou non une plate-forme pour recenser les vœux ne change rien au principe de tri des dossiers qu’opèrent ces filières sélectives.

La différence, c’est qu’avant Parcoursup, cette sélection n’était pas visible nationalement. Et la fameuse « pastille verte » d’APB permettait de masquer le problème, en proposant un pis-aller à ceux et à celles qui n’étaient accepté·e·s dans aucune filière sélective de leur choix. Ils avaient donc une réponse « oui », même si elle ne leur convenait pas du tout ! Leur exclusion était ainsi camouflée, loin du regard des médias.

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Pour certaines filières, dans le domaine médical et paramédical en particulier, ce système se conjugue à une forme de sélection encore plus violente avec l’existence de concours qui entraîne notamment la marchandisation de la préparation à ces concours. Ce système de préparation, parallèle, privé, et non qualifiant, conduit dans certains cas les étudiants à préparer pendant un, deux, voire trois ans un concours qu’ils déclineront dans sept à huit instituts différents.

Les coûts s’additionnent à chaque fois ainsi que les années de préparation qui ne valident aucun diplôme. Ainsi, plutôt que s’élever contre Parcoursup, qui ne fait que mettre en lumière une injustice dénoncée depuis longtemps par la FAGE et le SGEN-CFDT, il serait plus juste de s’attaquer aux vrais problèmes : toutes les formations postbac ont connu une très forte croissance de leurs effectifs ces dernières années, sans que les moyens soient augmentés en proportion.

Développer massivement la formation

Il est donc urgent de renforcer la dotation des établissements, avec une véritable logique de création de postes. Pour sortir de l’impasse liée à la sélection telle qu’elle existe actuellement, il faut définir les rôles respectifs des formations : quels publics pour quelles formations ? Quels moyens en fonction de ces publics ? Sinon, toutes les formations sélectives vont continuer à retenir ceux qui sont considérés comme de « bons étudiants », et continueront à leur consacrer des moyens très supérieurs aux formations non sélectives !

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Il convient de profiter de l’inclusion sur Parcoursup de l’ensemble des filières pour mettre fin aux concours qui barrent l’entrée de certaines filières, comme c’est le cas par exemple pour les formations de soins infirmiers.

On ne peut pas demander à des élèves de 15 ans (choix de la seconde) ou de 18 ans (postbac) de faire des choix dont ils ont l’impression qu’ils engagent leur vie entière. Il faut donc travailler à créer des passerelles entre les formations et développer massivement la formation tout au long de la vie afin de ne pas rester enfermé dans sa formation initiale.

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Il faut aussi développer l’accompagnement au lycée dès la seconde, pour que tous puissent préparer efficacement et sereinement cette étape essentielle du passage du secondaire au supérieur. Il faut donc donner du temps aux élèves et aux personnels des lycées et créer en particulier des postes de psychologues de l’éducation nationale.

Il faut développer les partenariats entre lycées et établissements d’enseignement supérieur. Pour cela il faut donner du temps aux personnels de ces établissements et créer des postes dans les services chargés de l’information, de l’orientation et de l’insertion professionnelle en particulier.

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