Fonction publique : Des annonces et des inconnues

Alors que le gouvernement lance une réforme de la fonction publique qui suscite craintes et appréhensions, la CFDT souhaite des clarifications et entend redonner la parole aux agents pour tordre le cou aux discours simplistes, voire démagogiques.

Quatre mois après le lancement en grande pompe d’« Action publique 2022 », censée accompagner la transformation de la fonction publique dans les années à venir, le Premier ministre a profité du premier comité interministériel de la transformation publique, le 1er février, pour faire une première série d’annonces. Il a d’abord lancé une concertation avec les organisations syndicales de la fonction publique sur quatre chantiers sensibles. Le premier concerne le dialogue social, que le gouvernement souhaite « simplifier » et « déconcentrer ». Le deuxième chantier a trait aux rémunérations des agents, que l’exécutif envisage plus « individualisées » afin de donner plus de place « au mérite et à l’atteinte des résultats individuels et collectifs ». Le troisième sera celui des parcours professionnels et de l’accompagnement des agents afin de mieux faire face à l’évolution des métiers et aux reconversions. Enfin, le quatrième n’est pas le moins polémique. Il sera consacré à « l’élargissement du recours au contrat pour donner davantage de souplesse dans les recrutements ».

Des sujets complexes et identitaires

Autant de sujets complexes et identitaires pour les agents sur lesquels les discussions risquent d’être vives. « Sur chacune des thématiques, nous avons des propositions à faire, mais nous serons très vigilants car nous avons également des lignes rouges, explique Mylène Jacquot, secrétaire générale de la CFDT-Fonctions publiques. Nous sommes aujourd’hui prudents car on a le sentiment que le gouvernement annonce en même temps une concertation et une partie des conclusions. Il est encore un peu tôt pour savoir si l’exécutif est dans une vraie logique de dialogue social ou s’il ne s’agit que d’effets d’annonces. »

Concernant la réforme de l’action publique, traitée de manière distincte, les annonces sont beaucoup moins précises. Le gouvernement s’est surtout concentré sur sa stratégie numérique. Il se donne ainsi comme objectif de rendre la totalité des services publics accessibles en ligne au 1er janvier 2022, tout en promettant en parallèle des moyens spécifiques « afin d’accompagner les citoyens les plus éloignés des outils numériques ». Enfin, un premier appel à projets de transformation de l’action publique est lancé. Il sera financé par un fonds doté de 700 millions sur cinq ans, dont 200 millions pour l’année 2018. Dernier sujet qui n’a pas manqué de faire polémique : le fameux « plan de départs volontaires » annoncé lors de ce comité par le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin. Effet de tribune ou véritable annonce gouvernementale ? Le projet ne figure en tout cas dans aucun document remis ce jour-là…

L’attente d’un dialogue social approfondi

Des annonces plus précises devraient être faites lors du deuxième comité interministériel de la transformation publique, prévu en avril. Chaque ministère devra d’ici là faire des propositions de réforme.
« Sur l’ensemble de ces sujets qui concernent tous les Français, la CFDT attend à présent que s’ouvre un dialogue social approfondi avec les représentants des agents mais aussi des usagers », souligne la secrétaire nationale Jocelyne Cabanal. La CFDT demande notamment que le gouvernement clarifie très vite ses intentions et qu’il définisse des objectifs ambitieux qui ne réduisent pas la transformation de l’action publique à une simple politique de réduction des coûts et du nombre de fonctionnaires. « La réforme ne pourra être pertinente que si elle est orientée vers une amélioration de l’action publique (cohésion sociale, lutte contre les inégalités, fracture numérique…) et définie collectivement, avec des agents partie prenante de ce vaste projet », insiste Jocelyne Cabanal, tout en faisant le lien avec le travail mené par la CFDT-Fonctions publiques pour donner la parole aux agents au travers du livre « L’autre trésor public ».

Dans une interview au journal Le Monde le 3 février, le secrétaire général de la CFDT a également pointé le déficit de dialogue et de méthode sur un sujet aussi important que la réforme de l’action publique. « On ne parle pas des missions du service public ni de ce que notre pays est prêt à investir pour avoir des politiques publiques de solidarité dignes de ce nom, déplore Laurent Berger. Et on n’écoute pas les fonctionnaires, on ne parle pas de leur travail au quotidien. Hurler au loup maintenant n’a aucun sens, mais la CFDT sera attentive et exigeante pour que l’action publique continue de reposer demain sur des agents publics reconnus et respectés. »

jcitron@cfdt.fr